Les ventes de voitures électriques ou hybrides rechargeables ont beau être encore confidentielles en Europe, elles constituent déjà un puissant levier de baisse pour le calcul des émissions CO2 des constructeurs automobiles. C'est ce que montrent les chiffres compilés par le think thank européen Transport & Environment à partir des données de l'Agence européenne pour l'environnement. Ces données mesurent l'impact, pour 2013, des supercrédits, ces bonus accordés aux constructeurs qui vendent des voitures émettant moins de 50 grammes de CO2 au kilomètre.
Selon les calculs de l'institut, Volvo est la marque qui a le plus profité du dispositif, en 2013, avec pas moins de 7,1 grammes de CO2 économisés, via les ventes de sa V60 hybride « plug-in » vendues en Europe. Viennent ensuite Nissan (4,7 grammes gagnés grâce à la LEAF), Renault (2,3 grammes avec 9.000 ZOE), Toyota (Prius rechargeable) et Daimler (Smart électrique), qui gagnent chacun 1,5 gramme.
Un impact élevé, qui s'explique par le mode de calcul retenu par la réglementation européenne. Celle-ci applique un coefficient multiplicateur aux ventes de voitures peu polluantes. En 2013, chaque vente de voiture émettant moins de 50 grammes de CO2 au kilomètre permettait au constructeur de comptabiliser 3,5 voitures de plus à ses volumes déclarés et de minorer ainsi mécaniquement son émission moyenne. Ainsi, grâce aux supercrédits, Nissan peut afficher une moyenne d'émission de 126,2 grammes de CO2 par kilomètre, soit en dessous de l'objectif qui lui a été imposé pour 2015 (129,8 grammes), alors même que les émissions moyennes de ses modèles s'établissent au-dessus (130,9). Quant à Renault, l'intégration du supercrédit lui permet d'accroître son leadership .
« Tour de passe-passe »
Vu le durcissement de la réglementation européenne - les émissions moyennes ne devront pas dépasser 95 grammes de CO2 par kilomètre en 2021 - les constructeurs ont tout intérêt à développer leurs gammes de véhicules verts répondant aux critères du supercrédit, sous peine de payer de lourdes pénalités financières. Dans les faits, si les marques généralistes n'ont pas forcément besoin de ce mécanisme pour respecter les normes, les marques premium y sont beaucoup plus sensibles. Ainsi, Volvo bénéficie à plein du dispositif du fait de sa moyenne d'émission plus élevée, portée par des modèles vieillissants comme le Crossover XC90, qui rejette 215 grammes de CO2 au kilomètre. De même si BMW n'a gagné que 0,5 gramme de CO2 (sa voiture électrique i3 n'est sortie qu'en toute fin d'année), elle devrait bénéficier plus fortement des supercrédits ces prochaines années. « Les supercrédits lui facilitent clairement l'atteinte des objectifs 2020 » indique Loreleï Limousin, de l'association Réseau Action Climat. Les marques allemandes ont d'ailleurs âprement défendu la préservation du dispositif. Certes, le dispositif sera moins généreux - le coefficient multiplicateur tombera à 2 véhicules en 2020 et le supercrédit sera plafonné à 7,5 grammes -, mais, d'ici là, les ventes de véhicules électriques ou hybrides rechargeables auront augmenté. Un panorama que dénoncent les associations environnementales. « Les supercrédits sont un simple tour de passe-passe comptable qui fausse la vision des émissions réelles et qui encourage les constructeurs à vendre des voitures polluantes », indique Greg Archer, de Transport & Environment.
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