Le groupe Volkswagen n’a jamais été aussi puissant. En 2014, il a enregistré un chiffre d’affaires de 202 milliards d’euros et écoulé plus de 10 millions de véhicules, manquant de peu la place de premier constructeur mondial derrière Toyota. Mais d’ici 2018, suivant son plan stratégique lancé en 2007, VW devrait arriver à ses fins. Or, la marque phare, Volkswagen, déçoit. Elle ne réalise que 2,5% de marge, contre 5 à 6% escomptés. Un grand plan d’économies a donc été lancé, de 5 milliards d’euros à atteindre d’ici 2017, à côté d’une politique de conquête aux Etats-Unis où les résultats sont jugés décevants.
LA SUCCESSION
Dans ce contexte, l’arrivée d’Herbert Diess chez Volkswagen, annoncée en décembre, faisait presque figure de camouflet pour Martin Winterkorn. Lui qui cumulait jusqu’à présent les fonctions de président directeur général du groupe et de la marque VW, devra abandonner ce dernier poste au profit d’Herbert Diess, ex-directeur du développement de BMW, au 1er octobre 2015. Agé de 56 ans, cet ingénieur a aussi été tout de suite pressenti (au moins par la presse allemande) comme un successeur de Martin Winterkorn à la direction opérationnelle du groupe. La succession n’aura cependant pas lieu tout de suite. Volkswagen a finalement annoncé ce vendredi 17 avril que Martin Winterkorn restera président du directoire du groupe et qu'une prolongation de contrat lui sera proposée l'an prochain. Un coup dur pour Ferdinand Piëch.
LA SECONDE SUCCESSION
Car à cette première succession s’en ajoute un seconde. Agé de 77 ans, Ferdinand Piëch devait laisser sa place de président du conseil de surveillance à Martin Winterkorn en 2017, quand ce dernier quittera ses fonctions opérationnelles chez Volkswagen. A côté de sa femme Ursula, actionnaire et membre du conseil de surveillance, "le vieux", comme il est surnommé en interne, installera ainsi un allié. La présence d’Ursula Piëch au conseil de surveillance faisait craindre aux observateurs, aux syndicats et à plusieurs membres de la famille Porsche, les autres grands actionnaires du groupe, que Ferdinand Piëch ne crée une dynastie à la tête de Volkswagen. Or tous ont confiance en Martin Winterkorn, ingénieur et industriel reconnu. Mais après la sortie de Piëch dans le Spiegel, cette seconde succession apparait remise en cause.
LES AUTRES PROTAGONISTES
Dans ce contexte de disgrâce, Herbert Diess ne serait pas le seul candidat en lice pour prendre les rênes de VW. Matthias Muller (62 ans), le directeur général de Porsche, pourrait aussi prendre la tête du groupe. Depuis décembre, chaque mouvement au sein du comité exécutif est examiné à la loupe par la presse allemande.
LES AFFAIRES DE FAMILLE
Ces questions de succession et la brouille Piëch-Winterkorn sont aussi un miroir des affaires de famille, qui ont perturbé le groupe ces dernières années. Ferdinand Piëch est connu pour son fort caractère, ses colères légendaires, ses relations tumultueuses avec ses douze héritiers. La tentative de rachat de VW par Porsche avait aussi créé beaucoup de brouilles entre les Porsche et les Piëch, les deux familles actionnaires de VW totalisant 53% du capital. Le porte-parole de la famille, Wolfgang Porsche, n’a d’ailleurs pas soutenu la position du cousin Piëch à propos de Martin Winterkorn.
Pour certains analystes, préparer leur succession est très intelligent de la part de Ferdinand Piëch et Martin Winterkorn, surtout en pleine ascension du groupe vers la place de numéro un mondial. La brouille des deux créateurs et animateurs de cette stratégie pourrait bien compliquer l’affaire.
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